En quoi un mariage forcé diffère-t-il d’une union conjugale forcée ? Quand parle-t-on d’arrangement et où commence la contrainte ? Ces distinctions sont particulièrement importantes dans le cas où d’éventuelles mesures ultérieures sont envisagées.

Dans l’ensemble, le Service contre les mariages forcés fait la distinction entre neuf formes de mariages. Les transitions et les nuances entre l’ingérence et l’autodétermination qui se retrouvent dans ces types de mariages sont expliquées plus en détail ci-dessous.

Violence genrée au sein de la parenté

La violence genrée au sein de la parenté (kin-based gender violence) se caractérise par des normes morales reposant sur des rôles de genre traditionalistes, familialistes et rigides. Le trait caractéristique de la violence genrée commise au sein de la parenté est le caractère étendu du crime : puisque outre les parents, des membres de la famille et des proches sont impliqués. Dans le contexte de la migration, lorsque nous nous penchons sur des personnes potentiellement impliquées dans un mariage forcé, il est important de prendre en compte l’importance de l’interdépendance transnationale. Un oncle en Angleterre peut tout autant exercer une pression que la grand-mère dans le pays d’origine, qui se met à la recherche d’un-e partenaire potentiel-le.

Il y a également une dissolution de la dichotomie des stéréotypes de genres portant sur le recours à la violence et l’expérience de celle-ci : les femmes, les mères ou les sœurs peuvent exercer des pressions, tout comme les hommes peuvent également être victimes.

Mariage et contrainte

Le mariage est toujours façonné par les normes sociales, les valeurs, les attentes de l’entourage et les projets de vie typiques. Mais si les attentes de l’environnement et de la famille deviennent les facteurs déterminants qui s’imposent, au détriment des souhaits des individus, alors les contraintes et les fardeaux liés au mariage et au choix du partenaire peuvent conduire à des mariages forcés.

Les fardeaux du mariage – normes contraignantes

Par « fardeaux du mariage », nous entendons toute forme de normes relatives au mariage ou à l’union conjugale. Quand et comment le mariage doit-il avoir lieu et qui est éligible ? Il s’agit notamment de l’obligation de se marier, de l’hétéronormativité, des injonctions sur l’âge du conjoint, du rapport à la sexualité et de la norme d’endogamie, selon laquelle un partenaire doit être choisi au sein du groupe d’origine. Ces lignes de conduite strictes peuvent peser sur le mariage et l’union, ainsi que sur le choix du conjoint et de ce fait, favoriser les mariages forcés.

Contrainte au mariage

Si un couple souhaite vivre ensemble, il doit se marier. Tel est le point de vue de certaines communautés traditionalistes pour lesquelles le mariage est le seul mode reconnu et souhaitable de vie commune pour les femmes et les hommes.

Il n’y a alors pas d’autre choix que de se marier et il est impossible d’opter pour une autre forme de vie comme le célibat ou la vie de couple hors mariage (appelée concubinage en Suisse).

Norme du sexe opposé (Hétéronormativité)

Un couple se compose d’un homme et d’une femme. Malgré la reconnaissance des partenariats homosexuels ou la possibilité pour les couples homosexuels de se marier, la norme du mariage hétérosexuel comme forme de vie de couple légitime domine dans presque tous les pays. Les relations entre personnes de même sexe ou les autres formes de relations sont considérées comme « déviantes » et peuvent être prohibées.

Trop vieux-vieille pour se marier ?

L’âge joue un rôle dans les décisions de mariage. Chez les femmes, il est communément admis que le fait de ne pas se marier avant un certain âge réduit les chances de trouver un époux. En Suisse romande par exemple, les jeunes femmes non mariées à 25 ans étaient nommées les Catherinettes en référence à Sainte Catherine d’Alexandrie, vierge martyre, patronne des jeunes filles. La coutume, encore présente dans certains milieux sociaux, voulait que les jeunes filles coiffées d’un chapeau vert et jaune, fassent le vœu d’un mariage prompt. Il existe encore aujourd’hui une norme sociale selon laquelle, dans un couple, la femme doit être plus jeune que l’homme.

Les trois moments des mariages forcés (« 3 vagues » chez les femmes)

Jusqu’à présent, les consultations en Suisse ont montré les « vagues de pression » suivantes autour du mariage :

  1. À 18 ans (mariage autorisé, majorité matrimoniale en Suisse)
  2. À 23 ans (âge idéal pour le mariage du point de vue de la famille)
  3. À 26 ans (risque de devenir une « vieille fille »)

Sexualité uniquement au sein du mariage ?

Le mariage est un moyen de prévenir les rapports sexuels avant et en dehors du mariage. La sexualité en dehors du mariage est connotée de manière très négative dans certaines communautés traditionalistes où la sexualité féminine est contrôlée et le culte de la virginité célébré. Ce sont les femmes qui en souffrent le plus. Un mariage (forcé) peut libérer la famille du devoir de contrôle de la sexualité de leur fille. Il peut aussi s’agir d’une mesure disciplinaire, notamment dans le cas où les parents ont de la peine à garantir la chasteté de leur fille vivant au sein de la société majoritaire, qui est plus libérale en matière de sexualité.

Injonctions et interdits autour de l’endogamie

Lorsqu’une personne n’est autorisée à se marier qu’au sein de sa propre communauté religieuse, de son propre groupe ethnique, linguistique ou social, on parle alors de contrainte à l’endogamie. Un mariage arrangé est généralement organisé sur la base de critères précis concernant le choix d’un partenaire. Par exemple, dans la région tamoule de Jaffna au Sri Lanka, il existe 216 castes. Les possibilités de mariage sont donc fortement réduites pour les diasporas et cette conception étroite peut conduire à des mariages forcés.

Dans les cas « d’interdiction d’aimer », il est fréquent que les personnes concernées outrepassent les contraintes à l’endogamie. Ce trilemme peut aussi toucher les ressortissants suisses non issus de la migration : une contrainte met en jeu deux relations et trois personnes sont concernées. Une personne concernée choisit « le/la mauvais-se petit-e ami-e » qui n’a pas la même origine ethnique ou religieuse et il s’en suit un mariage forcé à des fins disciplinaires avec un-e « bon-ne » partenaire. Voir la rubrique « Foire aux questions »

D’autres raisons susceptibles de conduire à des mariages forcés se trouvent dans la rubrique « Formes et causes ».

Les formes de mariage

En pratique, il est parfois difficile de déterminer où commence la contrainte autour du mariage, et les formes qu’elle prend. Il convient de bien faire la différence entre le fait qu’une personne se sente ou non contrainte par autrui lors du choix du partenaire pour le mariage, et le fait que celle-ci résiste ou non à la contrainte. Dans de nombreux cas, la personne concernée cède sous la pression et ne fait pas appel à une aide extérieure, rendant ainsi sa situation de contrainte invisible. C’est en raison de la difficulté à distinguer la présence ou non de contraintes qu’il existe un grand nombre de cas de mariages forcés non signalés, dits « chiffres noirs ».

Dans ce qui suit, nous distinguerons neuf types de mariages : le mariage forcé, le mariage arrangé, le mariage de mineurs, le mariage blanc, le mariage d’amour, le mariage organisé par soi-même, le mariage entre personnes de même sexe, la polygamie et l’union conjugale forcée. Ces formes de mariage varient en fonction de l’ingérence et de l’autodétermination.

Mariage forcé : ingérence en violation des droits humains

Ingérence en violation des droits humains : nous parlons de mariage forcé quand au moins une des personnes concernées (la mariée ou le marié) se sent contraint-e de contracter un mariage formel ou informel. Soit la personne en question n’est pas écoutée quand elle dit « non » ou exprime son refus, soit elle n’ose pas s’opposer par crainte de conséquences négatives ou encore à cause des différents moyens de pression utilisés par sa ou son fiancé-e, sa famille ou ses proches.

La pression psychologique, ainsi que le chantage affectif, les restrictions en lien avec le style de vie et la liberté de mouvement, ou d’autres comportements dégradants et dévalorisants aboutissent à ce que la personne se sente contrôlée. Dans des cas extrêmes, il peut même s’agir de menaces, d’harcèlements, de séquestrations ou de violences physiques ou sexuelles. La pression sociale et structurelle jouent également un rôle important dans le cadre des mariages forcés.

Les mariages forcés sont interdits en Suisse. Au niveau international, les mariages forcés sont également définis comme des pratiques violant les droits humains. Voir la rubrique « Droit et Lois ».

Les promesses de mariage forcés, appelées fiançailles forcées, sont également interdites en Suisse. Ces cas concernent souvent des personnes mineures. Selon la loi suisse, les fiançailles n’obligent pas à la conclusion d’un mariage (art. 90 al. 3 CC).

Le mariage n’est pas nécessairement conclu au bureau de l’état civil. En fonction des traditions culturelles ou religieuses auxquelles appartiennent les familles, il arrive souvent qu’un mariage informel (religieux généralement) soit plus important qu’un mariage formel. En Suisse cependant, la primauté du mariage civil s’applique (art. 97 al. 3 ZGB) et un mariage informel ne peut avoir lieu qu’après le mariage civil.

Mariage arrangé : consentement controversé

Dans le cadre d’un mariage arrangé, les parents, les proches ou des intermédiaires spécialisés dans l’arrangement de mariages choisissent l’époux ou l’épouse. La « personne à marier » peut accepter ou refuser la ou le candidat-e. Le fait que les personnes concernées aient une vraie chance de dire « non » est décisif. La famille et l’environnement social peuvent parfois exercer une forte pression sur la décision. Il est donc possible que les personnes concernées ne prennent conscience de la contrainte qu’après le mariage – même dans ce cas, on peut parler de mariage forcé.

Dans la société majoritaire suisse, les mariages arrangés ne sont pas interdits mais controversés, voir la rubrique « Les fardeaux du mariage ».

De l’arrangement à la contrainte – trois perspectives

  1. Selon la perspective relativiste culturelle : les mariages forcés et arrangés sont deux phénomènes différents qui ne se chevauchent pas. Ainsi, il est admis que dans certaines sociétés, les mariages arrangés soient monnaie courante et que cette forme de mariage n’y est donc pas perçue comme une forme de contrainte. En résumé : autres pays, autres coutumes.
  2. Un mariage arrangé peut être un mariage forcé, mais ce n’est pas nécessairement le cas. Le mariage forcé et le mariage arrangé se chevauchent. Cette position est celle du Service contre les mariages forcés : les mariages arrangés sont légalement autorisés en Suisse, alors que les mariages forcés y sont interdits. Cependant, il existe une zone grise entre les deux, un chevauchement. En tant que centre de consultation, nous considérons les personnes concernées comme des sujets actifs, même lorsqu’elles acceptent le choix des partenaires proposés par des tiers. Toutefois, l’individu ne doit pas être abandonné à son sort.
  3. Puisque les mariages arrangés engendrent des fardeaux comme les pressions à se marier, à l’endogamie, à « l’âge pour se marier » et à l’hétéronormativité, ils font l’objet de contraintes. Selon l’approche féministe libérale, toute ingérence dans le mariage représente une contrainte. De ce point de vue, il n’y a pas de zones grises ou de gradations, le mariage forcé et le mariage arrangé se confondent.

Mariage de mineur-e-s : ingérence ou autodétermination révocable

En Suisse, les personnes mineur-e-s ne peuvent pas se marier : pas de mariage avant d’avoir atteint la majorité (18 ans). Il arrive cependant que la règle de la majorité soit contournée par la célébration d’un mariage religieux (mariage informel) ou de fiançailles forcées.

Les mariages de personnes mineures sont combattus au niveau international. La Charte Africaine des Droits et du Bien-être de l’Enfant définit les mariages de personnes mineures comme une pratique sociale et culturelle néfaste.

Art. 21 al. 2 : « Les mariages d’enfants et la promesse de jeunes filles et garçons en mariage sont interdits et des mesures effectives, y compris des lois, sont prises pour spécifier que l’âge minimal requis pour le mariage est de 18 ans […] ».

En Suisse, cependant, il existe encore des lacunes dans la loi sur le mariage des mineur-e-s. Si aucun mariage ne peut être célébré devant les autorités suisses avant d’avoir atteint 18 ans révolus (art. 94 CC), le mariage d’une personne mineure conclu à l’étranger peut être reconnu en Suisse dans le cadre d’une pesée des intérêts selon l’art. 105 ch. 6 CC, ceci lorsque la personne mineure n’a plus l’âge de protection légal (à partir de 16 ans).

Mariage blanc : autodétermination irrégulière

Un mariage blanc est un mariage qui n’est pas conclu dans le but de créer une union permanente. Il s’agit plutôt d’obtenir certains droits (visa d’entrée, droit de séjour, droit de demeurer).

Les mariages blancs constituent une violation de l’ordre juridique suisse. Le Tribunal fédéral définit le mariage comme une « cohabitation durable d’un homme et d’une femme qui forment une communauté de vie étendue. » (ATF 119 II 264, cons. 4b, JdT 1996 I p. 339).

Cependant, les mariages blancs sont autodéterminés et ne relèvent pas forcément de contraintes.

Le mariage dit « Lavendelehe » décrit la décision stratégique des personnes homosexuelles de contracter un mariage hétérosexuel dans le but de contourner les sanctions sociales ou l’interdiction de l’adoption.

Mariage d’amour : décision fondée sur des sentiments amoureux

Le mariage d’amour représente l’idéal social dans les sociétés caractérisées par l’individualisme, y compris en Suisse. Il s’agit a priori de la forme de mariage la plus courante. Cette forme de mariage autodéterminé est basée sur une décision de mariage fondée sur l’amour entre deux individus. Cette union est conclue de plein gré et à la demande des deux partenaires. Si l’amour est central, d’autres facteurs tels que l’argent, le revenu, le prestige et les attentes sociales peuvent également jouer un rôle important.

Mariage organisé par soi-même : autodétermination avec aide extérieure

Un mariage organisé par soi-même se fait par l’intermédiaire d’outils simplifiant le processus de sélection. Ainsi, pour trouver le bon partenaire, les personnes qui souhaitent se marier comptent sur le support de petites annonces ou de sites internet (sites de rencontres, agences matrimoniales en ligne, etc.). Un large choix d’outils est disponible pour la recherche de partenaires, les personnes prêtes à s’engager utilisent les petites annonces pour identifier un-e potentiel-le partenaire de vie.

Les critères choisis par les intéressé-e-s tels que les caractéristiques physiques, sociales ou encore les traits de caractère changent avec le temps. Alors que les femmes recherchaient autrefois des hommes fidèles, aujourd’hui ce sont ceux ayant de l’humour qui sont les plus recherchés. De leur côté, les hommes aspirent aujourd’hui à des femmes fidèles et honnêtes. Les critères choisis par les candidat-e-s influencent la présélection mais le choix du partenaire reste libre.

On estime désormais qu’en Suisse, un mariage sur trois est organisé avec l’aide de tels outils, et la tendance est à la hausse. Les critères tels que la couleur des yeux et les goûts musicaux limitent la diversité de constellations des couples dans la recherche d’un-e partenaire. Les promesses faites par les agences de rencontres d’obtenir un « taux de compatibilité élevé » au moyen d’algorithmes ou d’autres concepts « scientifiques » de combinaisons et de sélection augmentent davantage les exigences imposées à un-e partenaire.

La possibilité de faire connaissance en ligne est perçue comme une libération, en particulier pour les jeunes fortement contrôlés par leur famille. Cependant, l’espace virtuel a aussi ses inconvénients, comme la pédo-criminalité, ou encore l’exercice de pressions grâce aux informations personnelles qui y sont diffusées. Par exemple, un frère peut découvrir le profil de sa sœur sur un chat de rencontre et la dénoncer à leurs parents.

Les multiples possibilités en ligne ont radicalement changé la façon de chercher des partenaires prêts à s’engager rapidement dans une relation, qu’ils soient de sexe opposé ou de même sexe.      Aussi, la recherche d’un-e partenaire, organisée de cette façon par la personne concernée, peut mener à un mariage d’amour.

Mariage entre personnes de même sexe : autodétermination sans hétéronormativité

Le mariage homosexuel est maintenant autorisé dans de nombreux pays, comme l’Espagne, le Portugal, la Norvège, la Suède, les Pays-Bas, la Belgique, la France, l’Irlande, la Nouvelle-Zélande, l’Argentine, l’Uruguay, le Brésil, la Colombie, l’Afrique du Sud, l’Allemagne et d’autres pays. La liste s’allonge constamment. Cela a pour effet de rompre avec la norme de l’hétérosexualité en matière de mariage.

En Suisse, depuis 2007, le partenariat enregistré est une forme légale reconnue d’union sous forme d’enregistrement pour des couples homosexuels, toutefois le « mariage gay » en tant que tel n’existe pas.

Polygamie : autodétermination controversée

La polygamie est un régime matrimonial dans lequel une personne est mariée à plusieurs personnes en même temps. Il s’agit d’une forme traditionnelle de mariage multiple qui est interdite en Suisse (art. 215 CP).

La polygynie, c’est-à-dire lorsqu’un homme épouse plusieurs femmes, est la forme de polygamie la plus courante. Le cas inverse de la polyandrie, lorsqu’une femme a plusieurs maris, est beaucoup moins fréquent.

La monogamie sérielle désigne un remariage après un divorce, et est autorisée en Suisse. Certaines collectivités aux valeurs catholiques prononcées sont critiques, voire hostiles au divorce. A Malte par exemple, le divorce n’est autorisé que depuis 2011, alors qu’il est toujours interdit aux Philippines.

Le polyamour est un modèle de relation multi-érotique et/ou multi-amoureuse régie par le plein consentement et en connaissance de cause de toutes les personnes impliquées. Un mariage formel entre plus de deux personnes n’est pas possible.

Union conjugale forcée : contrainte à rester marié-e

Une union conjugale forcée est l’obligation de rester dans un mariage déjà contracté. Elle a lieu lorsqu’au moins l’un des deux époux se sent obligé de poursuivre le mariage et ne peut le dissoudre en raison des pressions exercées par le ou la conjoint-e, les parents ou l’entourage. Une telle obligation de rester marié-e peut survenir à la suite de toute forme de mariage, par exemple après un mariage d’amour organisé sans intervention externe.

Les personnes concernées sont soumises à différents moyens de pression. La violence sexuelle et la violence domestique jouent généralement un rôle central. La dépendance économique ou légale (titre de séjour) oblige souvent les victimes d’une union conjugale forcée à rester au lieu de fuir la situation de contrainte. L’art. 50 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration (LEI) prévoit un droit de rester, indépendant de l’état civil, dans des circonstances particulières : en cas de violences domestiques, de mariage forcé ou lorsque la réintégration sociale dans le pays d’origine est fortement compromise.

La nécessité de prouver aux autorités judiciaires qu’il ne s’agit pas d’un mariage blanc peut se traduire par une obligation structurelle de rester dans le mariage.

En outre, il existe d’autres formes de contrainte autour de sujets tels que le mariage, le choix du partenaire ou la sexualité.

Interdiction d’aimer : ingérence avant les projets concrets de mariage

Même si le mariage n’est pas encore envisagé, des contraintes et un contrôle sur les relations amoureuses peuvent survenir. Dans le cas d’une interdiction d’aimer, les personnes concernées ne sont pas autorisées à avoir une relation avec une personne qui ne correspond pas aux attentes de leur famille. Comme pour le mariage forcé, des normes fortes liées à l’hétéronormativité et à l’endogamie dominent (voir les fardeaux du mariage). Une interdiction d’aimer peut également signifier que les relations amoureuses de manière générale ne sont pas autorisées avant le mariage. Ceci est étroitement lié aux idéaux sur la sexualité, la virginité et la moralité.

Les personnes concernées, dont la famille découvre l’histoire d’amour non désirée ou non autorisée, sont souvent soumises à des contrôles, des contraintes et des mesures disciplinaires plus sévères. Leurs partenaires amoureux interdits ou pas acceptés par la famille peuvent aussi être affectés.

Mariage informel : mariage culturel, traditionnel ou religieux qui peut être autodéterminé ou déterminé par des tiers

Non seulement à l’étranger, mais également en Suisse, des mineurs sont encore mariés dans le cadre de rituels religieux traditionnels et informels. De nombreux rapports font référence à des cas liés à l’Islam ou à des mariages dits « d’imam ». Mais il arrive aussi que des mariages de mineurs soient célébrés en Suisse, par exemple, au sein de familles roms d’origine catholique, Yézidis ou Druzes (voir par exemple NZZaS 29.01.2017).

Le mariage culturel ou religieux bénéficie souvent de plus d’importance par l’entourage qu’un mariage officiel par les autorités de l’état civil. Dans le droit suisse, il existe un mécanisme efficace pour protéger les mineurs contre les mariages forcés. Il s’agit de la primauté des mariages civils conformément à l’art. 97, al. 3 CC : « Le mariage religieux ne peut précéder le mariage civil ». Les mariages religieux ne devraient pas être célébrés avant le mariage civil. Mais c’est néanmoins ce qui se passe en pratique, au détriment des mineurs qui en souffrent.

Aussi, la question des mariages religieux a récemment été abordée en politique. Cependant, le Parlement est arrivé à la conclusion que l’abolition ou l’affaiblissement de la primauté des mariages civils pourrait conduire à une nouvelle augmentation des mariages de mineurs.

En Allemagne, l’interdiction de la primauté du mariage religieux a été abrogée en 2009, et réintroduite en 2017 pour les personnes de moins de 18 ans, entre autres, en raison du nombre croissant de mariages de mineurs.

La primauté du mariage civil sur le religieux ne protège pas seulement le mariage, mais également l’union conjugale contre l’arbitraire et la privation de droits. Le mariage civil réglemente le mariage et uniformise les droits liés au divorce et à la séparation, ce qui n’est pas toujours le cas des mariages religieux. Sans la possibilité d’un divorce civil, les personnes qui n’ont été mariées que religieusement peuvent se voir refuser toute possibilité de dissoudre le mariage.

Fiançailles forcées et fiançailles forcées de mineurs : promesse de fiançailles par un tiers

Les couples sont promis au mariage, mais au moins une personne du futur couple de mariés n’est pas d’accord. Les personnes concernées sont souvent des mineurs.

Les fiançailles ne donnent pas lieu à une demande de mariage juridiquement contraignante en Suisse (art. 90, al. 3 CC). Contrairement, par exemple, à l’art. 21 al. 2 de la Charte Africaine des Droits et du Bien-être de l’Enfant du 11.07.1990, la législation suisse n’interdit pas les fiançailles de mineurs. L’article 90 alinéa 3 du CC stipule que : « La loi n’accorde pas d’action pour contraindre au mariage le fiancé qui s’y refuse ». Cependant, dans les familles où les mariages de mineurs sont dus à des structures adultes fortes et à des normes rigides en matière de mariage et de sexualité, les fiançailles peuvent constituer une étape publique contraignante et difficile à rompre. Cela signifie que les fiançailles de mineurs peuvent aussi devenir un contournement de facto de la limite légale du mariage, fixée à 18 ans. Cela peut également conduire à des engagements forcés.

Les concepts entourant les formes de mariage forcé et d’union conjugale forcée ainsi que les nuances entre l’ingérence et l’autodétermination, forment une bonne base pour comprendre les phénomènes auxquels nous sommes confrontés. Cela n’est toutefois pas suffisant pour comprendre comment le mariage forcé se produit.

Vous trouverez plus d’informations sous la rubrique « Formes et causes ».

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